Toi le frère que je n’ai jamais eu…
Un nouveau système solaire fut découvert : Trappist-1. Plus de 600 années plus tard, l’humanité est en voie d’extinction. Toute violence et esprit de révolte a été annihilé par l’ajout d’un inhibiteur dans la séquence ADN des individus. Chaque être humain est désormais sous la coupe d’extraterrestres qui les utilisent comme esclaves pour extraire du minerai dans les champs d’astéroïde du « soleil rouge ». Jusqu’au jour où apparaissent les « Dots », un groupe d’hommes et de femmes qui ont réussi à se libérer de ce carcan, à la suite d’un mystérieux accident…
Pour l’une de ses premières œuvres, les éditions Kamiti ont fait appel à une valeur sure, Stéphane Louis alias Louis. On a pu le voir officier dernièrement dans Road Therapy mais il a aussi travaillé sur Kookabura, Khaal ou encore Sept. Bien qu’il soit également dessinateur, c’est en tant que scénariste qu’il intervient sur ce dyptique (qui correspondrait à un premier cycle). Le dessin, quant à lui, est réalisé par une jeune autrice dont c’est le premier album mais que l’on devrait revoir dans les prochains mois, Alessandra de Bernadis alias ALE.
Ayant lu en début de l’œuvre que le système solaire, utilisé comme décors de cette aventure, s’appelait Trappist-1, je me suis demandé si le scénariste avait suivi la même méthode que celle préconisée par John W Campbell à ses auteurs, c’est-à-dire toujours partir de faits scientifiques réels. C’est pourquoi, intéressé, j’ai effectué quelques recherches pour en savoir plus. Néanmoins, sur les différentes sources que j’ai consultées pour recouper mes informations, les dates mentionnées pour la découverte de ce système n’étaient pas identiques. J’ai donc posé la question à Michael Gillon, astronome et astrophysicien, qui a très gentiment accepté de me répondre. Il m’a précisé que son équipe et lui avaient découvert les 3 premières planètes du système fin 2015, et publié cette découverte en 2016, rebaptisant par la même occasion l’étoile en TRAPPIST-1. Puis en 2016, ils avaient trouvé quatre autres planètes dans le système, et publié ce résultat en 2017.
L’idée de départ de cette bande-dessinée, provient de l’éditeur lui-même, qui la confié à Louis. Ce dernier l’a transformée en nous proposant un scénario de science-fiction orienté space opera. Connaisseur reconnu du genre, il utilise les ingrédients classiques pour concocter une bonne histoire SF, qui traite en filigrane de sujets d’actualité comme l’esclavage, dont on commémore cette année les 170 ans de son abolition. Les différents axes de réflexions intégrés à cette BD, donnent un deuxième niveau de lecture à ce récit, déjà, agréable à lire. Dans le premier tome, l’auteur pose les bases qui vont servir de fondation à la fois du deuxième tome mais aussi à l’univers que le scénariste a prévu de développer. Cela ne me semble pas déconnant car il y a de nombreuses idées à explorer et qui, à mon sens, ne pourront pas tous être traitées dans le deuxième volet de ce dyptique.
La jeune autrice ALE s’est inspirée de références aux films de SF, aux romans mais aussi aux jeux vidéo auxquels elle joue (notamment Mass Effect) ou encore aux illustrations de H.R. Giger. Son coup de crayon est agréable, détaillé et s’adapte plutôt bien aux décors spatiaux, aux vaisseaux et aux aliens. L’efficacité de son style s’illustre également dans sa façon de faire passer des émotions dans les visages des personnages. En lisant le making-off en fin de l’album, on apprend que Stéphane Louis a accompagné Alessandra dans la construction des enchainements de cases en lui proposant un découpage, basé sur sa propre expérience de dessinateur. Bien que la dessinatrice (également coloriste) ait essayé de jouer sur les contrastes chromatiques en fonction des lieux, je trouve les couleurs très sombres voire trop saturées parfois pour les extérieurs. Je ne peux pas m’empêcher de me demander quelle ambiance aurait été donnée si les couleurs avaient été réalisés par Vera Daviet, compagne et coloriste attitrée de Louis.
Pour être honnête, deux autres points m’ont un peu gêné. Dans ce premier tome on trouve quelques coquilles et fautes d’orthographes. Mais je pense que c’est juste un péché de jeunesse de cette toute nouvelle maison d’édition qui va surement rectifier le tir, en intensifiant son attention sur la relecture, pour le deuxième tome et les futures œuvres de son catalogue. Une autre chose qui m’a perturbé, cette fois-ci dans la narration, correspond à un enchainement de planches qui nuit à la lisibilité. Je pense que c’est un effet de style de l’auteur qui a voulu être original mais j’ai trouvé que les planches 26 et 27 s’intercalent de manière trop abrupte entre 2 séquences. Peut-être pour surprendre le lecteur en effectuant une transition auquel il ne s’attend pas ? Toujours est-il que l’on se demande, au final, s’il n’y a pas eu une erreur dans la composition de l’album et si une inversion de l’ordre des pages (d’ailleurs, elles ne comportent pas de numéro) ne se serait pas produite lors de l’impression.
Il n’en demeure pas moins que ce premier album remplit parfaitement son office, notamment en lançant des pistes et en laissant des zones d’ombres à exploiter. Il est agréable à lire et j’attends la suite pour savoir si le deuxième tome vient confirmer le potentiel de cet univers qui reste à explorer.
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